Aux États-Unis, la poussée des extrêmes se confirme
AFP
Imprimer
5/21/2022 11:06:41 PM - Publié par webmaster@ekilafrica.com  


À six mois des élections de mi-mandat, le paysage politique américain est en ébullition. Des démocrates percent plus à gauche, des républicains, poussés par Trump et le conspirationnisme, lorgnent vers l’extrême droite.
Un candidat au Congrès américain récitant un rap anti-Biden sur sa gigantesque pelouse marquée d’un «TRUMP 2Q2Q» – le Q faisant référence à la mouvance conspirationniste d’extrême droite QAnon –: la nouvelle saison électorale qui s’ouvre en Amérique révèle au grand jour la poussée des extrêmes en politique. Pour empêcher J.R. Majewski, le candidat derrière ce clip électoral et soutenu par Donald Trump, de pouvoir prétendre à l’investiture républicaine, l’establishment conservateur à tout essayé – abreuvant la campagne de ses rivaux de centaines de milliers de dollars. En vain.

Depuis le début du mois de mai, lancement officiel du bal des primaires de mi-mandat, qui détermineront l’équilibre des forces politiques aux États-Unis pour les prochaines années, l’immense majorité des candidats soutenus par l’ancien président ont gagné, au grand dam des conservateurs plus modérés, inquiets de voir les idées centristes et les recherches de compromis mourir à petit feu.

Elle veut dissoudre le Ministère de l’éducation et a de bonnes chances d’être élue

En Caroline du Sud, une candidate soutenue par Donald Trump et qui a appelé à la dissolution du Ministère américain de l’éducation, à la destitution du président Joe Biden et à l’arrestation du conseiller de la Maison-Blanche sur le Covid-19, a ses chances de déloger l’élue Nancy Mace, répudiée par l’ancien président depuis qu’elle l’a accusé d’être responsable de l’assaut du Capitole, le 6 janvier 2021.

Et en Pennsylvanie, le sénateur local Doug Mastriano, qui martèle toujours que la présidentielle de 2020 a été «volée» à Donald Trump – et a cherché à aider le milliardaire républicain à le prouver – a décroché, mardi, la nomination de son parti pour briguer, en novembre, le poste de gouverneur.

Le «socialisme» comme propagande

De l’autre côté de l’échiquier politique, des idées jusqu’ici taboues comme le socialisme – qui, pour beaucoup d’Américains, évoque encore le spectre de la Guerre froide – ont le vent en poupe. En Pennsylvanie, là encore, une démocrate qui se revendique ouvertement comme «socialiste» était ainsi en tête, jeudi, d’une course pour décrocher l’investiture de son parti pour un siège à la Chambre des représentants.

Summer Lee a, durant sa campagne, reçu le soutien des Justice Democrats, le groupe qui a poussé pour l’élection, en 2018, d’une des stars de son parti, la jeune Alexandria Ocasio-Cortez (32 ans). L’élue de New York aux 8,5 millions d’abonnés sur Instagram est la membre la plus connue d’un groupe de démocrates, le Squad, essayant de tirer autant que possible la couverture à gauche.

Sur son compte Twitter, «AOC» n’hésite pas à dénoncer nommément les élus les plus centristes de son parti et à soutenir des candidatures progressistes contre eux. Disposant d’une forte caisse de résonance, cette frange démocrate est susceptible de gagner des sièges et de l’influence lors des élections législatives de novembre.

Le grand écart en 50 ans

Une analyse du Pew Research Center révèle que démocrates et républicains sont plus éloignés politiquement aujourd’hui qu’à n’importe quel moment au cours des 50 dernières années, avec un délitement progressif du centre.

En 1972, 144 républicains de la Chambre des représentants étaient considérés comme moins conservateurs que le démocrate le plus conservateur, et 52 démocrates moins libéraux que le républicain le plus libéral. Selon le centre d’analyse, cette zone commune a commencé à s’effriter, jusqu’à disparaître complètement en 2002, peu après l’élection de George W. Bush.

Pas de place pour les compromis

Le Common Ground Committee, une organisation qui fait campagne pour réduire les incivilités en politique, dit aussi avoir observé un durcissement du discours public après la crise de 2008. «Nous sommes dans une situation de plus en plus acerbe, provoquée par une mentalité de «prime au vainqueur» au Congrès, qui décourage fortement ceux qui tentent des compromis transpartisans», estime Bruce Bond, cofondateur de ce groupe, pour qui le tout est exacerbé par des chaînes d’informations «ultrapolarisées».

L’argent y est aussi pour quelque chose, selon la consultante politique Zee Cohen-Sanchez: «Nos élections sont devenues extraordinairement coûteuses, donc les gens cherchent à gagner de l’argent rapidement plutôt que de collecter de l’argent auprès d’Américains ordinaires», estime-t-elle. Cela incite, selon elle, les candidats à prendre des positions controversées, qui attirent l’attention et génèrent des fonds. «Et», alerte-t-elle, «c’est là que ça devient dangereux.»
Imprimer

 


  © Ekilafrica